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Mi-janvier
Des familles d’expatriés français reviennent avec ceux de leur proches venus les voir en Chine pendant les fêtes de fin d’année, car ils ont peur pour leur santé. Il se passe quelque chose. Il semble qu’une épidémie commence là-bas.
Le virus, qui incubait depuis décembre, apparaît dans une grande ville chinoise, Wuhan : quelques jours plus tard, à la télé, on commence à voir des passants avec des masques sur le visage. En tous cas la ville et toute sa province sont mises en quarantaine, et c’est curieux de voir ces familles déambulant dans les rues, toutes équipées, très disciplinées, obéissant aux strictes consignes d’hygiène, et les camions qui désinfectent à grand jet les immeubles et les trottoirs.
A Pékin, l’immense rassemblement pour le Nouvel An lunaire est annulé, mais sans doute de nombreuses familles avaient déjà commencé à se déplacer de certaines régions pour y aller. Le virus se répand.
C’est surréaliste.
On avait déjà vu ça il y a presque vingt ans avec l’épidémie de Sras. Pourtant, il n’y avait eu que 800 morts dans le monde. Ce n’est pas beaucoup. Probablement cette discipline a dû être efficace. Et puis c’est loin, c’est là-bas, au fond de l’Orient extrême. On sait aussi que les chinois sont obéissants, et de toutes façons ils n’ont pas le choix, avec leur régime dictatorial : dès qu’il sortent, des policiers leur prennent la température, et on sait que les autorités leur donnent des bons ou des mauvais points selon la façon dont ils se comportent. On dit d’ailleurs que le gouvernement chinois a tenté de cacher le début de l’épidémie, et a même sanctionné le médecin lanceur d’alerte, qui a voulu informer depuis décembre.
Heureusement, on n’aura jamais ça chez nous.
C’est vrai aussi qu’il y avait eu l’Ebola, en Afrique. Mais bon, pauvres africains, on sait que c’est dur pour eux.
On n’aura jamais ça chez nous.
Il y a 280 cas notifiés par l’OMS, dont 50 graves et 6 décès.

Fin janvier
Ça y est, le séquençage du virus est établi par l’OMS. La Chine est de plus en plus confinée, dans de nombreuses métropoles.
Heureusement qu’on ne vit pas dans ce genre de régime, on ne le supporterait pas.
Comment supporter, en effet, un enfermement généralisé, pour seulement 6 décès : ils sont vraiment paranoïaques, ces chinois.
A Wuhan, des mesures de confinement vont très vite : d’abord obligation de rester chez soi sauf pour faire des courses, puis autorisation de sortie tous les trois jours, et finalement interdiction totale de se déplacer, avec approvisionnement devant les portes par du personnel protégé.
Il y a quelques cas dans les pays limitrophes de la Chine. Là aussi, mesures drastiques en Corée du Sud, à Hong Kong, à Singapour, mais bon, les asiatiques sont confucéens, c’est bien connu, et acceptent l’autorité de l’État, même lorsqu’il est privateur des libertés de l’individu.
Le virus commence à sortir de Chine, mais il paraît plutôt modéré.
On entend qu’il pourrait se répandre, que ça pourrait devenir une pandémie. Il est vrai que ça fait longtemps qu’on nous dit qu’un méchant virus pourrait un jour décimer l’humanité.
Moi, je n’y crois pas trop, quoique...
Car tout de même, si on cherche bien, on constate qu’il y a des cas sporadiques dans d’autres pays : 2 cas en Thaïlande, 1 cas au Japon, 1 cas en Corée. Mais ça n’a l’air de rien, ce n’est pas possible que cela se diffuse, les pays asiatiques contrôlent. Et puis, les malades sont uniquement des personnes qui reviennent de Chine. Elles sont mises en quarantaine, ça devrait suffire pour arrêter la contagion.
Mais ça commence à faire un peu peur, surtout par le fait que si la Chine s’arrête, il y aura des retombées sur l’économie occidentale, puisqu’elle est l’usine du monde. C’est comme ça qu’on apprend que les principes actifs de beaucoup de nos médicaments sont fabriqués là-bas. Des politiques parlent alors de tirer les leçons de l’épidémie chinoise pour l’avenir en relocalisant les secteurs indispensables de nos activités.
Tiens, décidément, cette histoire leur donne à penser.

Eveline GRIEDER